Jean Guizonnier

13/08/2020
Il y a 76 ans mourait, exécuté par la milice, le Capitaine Jean Guizonnier, Chef du Corps des Sapeurs-Pompiers de Montpellier. Il était ingénieur, directeur des services municipaux des travaux publics de la Ville. Dans la résistance il était connu sous le nom de Girardin. Un des centres de secours de Montpellier, dans le quartier Mosson, porte son nom. Reposez en Paix.

 

Né le 7 février 1899 à Moindou (Nouvelle-Calédonie), mort le 13 août 1944 à Montpellier (Hérault) ; ingénieur, directeur des Services municipaux des Travaux publics de Montpellier ; résistant ; responsable départemental du NAP dans l’Hérault et du MLN à Montpellier ; exécuté par la Milice à Montpellier.
Jean Guizonnier était le fils d’un administrateur colonial en Nouvelle-Calédonie, André, François, Marie Guizonnier. Il naquit dans un village proche de Nouméa.
Il intégra l’École polytechnique pendant la première guerre mondiale mais fut mobilisé en avril 1918 et incorporé à Toulouse dans le 23e RAC (Régiment d’artillerie de campagne). Il combattit dans les Flandres et sur la Somme jusqu’en novembre 1918. Après la guerre, il entra à l’École d’application d’Artillerie et du Génie de Fontainebleau. Il termina sa formation avec le grade de lieutenant le 23 décembre 1919.

À Montpellier, il fut nommé directeur adjoint à la voirie en mars 1926 ; en août de la même année, il devint l’adjoint du chef de corps des pompiers de la ville, le colonel Gustave Ferréol. Il fut promu du grade de lieutenant à celui de capitaine en janvier 1933.
Il avait épousé Marie Raynaud, née le 11 novembre 1895 à Lacaze dans le Tarn, et ils eurent une fille, Nicole, née à Montpellier le 27 janvier 1930. Il était protestant, conseiller presbytéral de la paroisse de la rue Maguelone à partir de 1942.

Jean Guizonnier fut mobilisé de nouveau, avec le grade de capitaine, le 20 août 1939 dans le 56° régiment d’artillerie de montagne.Il fut fait prisonnier en Normandie le 12 juin 1940, transféré à Doullens en Picardie puis dans un camp de prisonniers proche de Lille, à Seclin, et enfin en Allemagne dans l’Oflag de Weinsberg situé dans le land de Bade-Wurtemberg, jusqu’au 20 août 1941. Il fut libéré à la suite d’accords passés entre la France et l’Allemagne, en tant qu’ancien combattant de la première guerre. C’était un « congé de captivité » qui n’annulait pas le statut de prisonnier de guerre et lui faisait obligation de s’astreindre à des contrôles réguliers.

En mai 1942, Jean Guizonnier fut nommé à la tête du service municipal des Travaux publics de Montpellier, puis en novembre 1942 il devint chef de la Défense passive et, en janvier 1943, il remplaça Gustave Ferréol à la tête des sapeurs-pompiers de Montpellier. C’est en raison des opportunités offertes par ces différentes fonctions qu’il fut sollicité en 1943 par un responsable du NAP, l’ingénieur des Ponts et Chaussées Joseph Lassalvy. Jean Guizonnier, sous le pseudo de « Girardin » devint le responsable du MLN pour Montpellier et du NAP pour l’Hérault. Il contribua à la fourniture de faux papiers à ceux qui étaient devenus des clandestins et lutta activement pour aider les requis du STO. Le NAP, à l’occasion du 11 novembre 1943 (« 25° anniversaire de la défaite allemande »), distribua à la population de Montpellier – ville très touchée par les pénuries -, des cartes d’alimentation et et un tract au nom des MUR (Mouvements unis de la Résistance). Jean Guizonnier avait aussi prévu deux plans applicables au moment de la Libération : l’un pour parer à d’éventuels sabotages décidés par les Allemands ; l’autre pour fournir aux FFI des véhicules et du carburant stockés à cet effet par les services de la voirie. Il avait été prévu, lors d’une réunion clandestine le 28 juin 1944, qu’il intégrerait le CDL de l’Hérault.

Placé sous surveillance par l’intendant de police Hornus qui avait succédé à Pierre Marty en mai 1944, il fut arrêté sur son lieu de travail à la mairie le 8 août 1944 par des miliciens conduits par un membre de la Délégation régionale des Renseignements généraux, un organisme créé depuis 3 mois qui bénéficiait d’un pouvoir arbitraire illimité pour traquer les résistants. La situation était d’autant plus dangereuse que depuis juillet, le préfet délégué de l’Hérault était un milicien, Jean-Paul Reboulleau ; il n’y avait donc aucun recours possible pour les victimes de la Milice. Joseph Lassalvy avait déjà été arrêté, mais Jean Guizonnier avait décidé de rester à son poste en dépit du danger.

Jean Guizonnier fut emprisonné à la caserne de Lauwe, frappé à coups de nerf de bœuf, marqué au fer rouge, humilié, torturé pendant plusieurs jours. Le jeune Raoul Batany était alors dans une autre cellule de la prison, dans les mains des mêmes tortionnaires. Jean Guizonnier survécut jusqu’au 11 août dans des conditions atroces. Trois jours après, ce fut le début de la retraite allemande et de la fuite des miliciens. Ils tuèrent par balles Raoul Batany le 17 août avant de quitter Montpellier. Les corps de Guizonnier et de Batany ne furent découverts que le 6 septembre, enfouis sous la cour de la caserne, après plusieurs recherches.

Jean Guizonnier fut inhumé le 9 septembre au cimetière protestant de Montpellier après une cérémonie qui réunit les principales personnalités de la ville et une grande foule. La caserne des sapeurs-pompiers de la rue Pitot reçut son nom et le conserva quand elle fut transférée à La Paillade.

La médaille de la Résistance avec rosette fut attribuée à Jean Guizonnier en août 1946.

SOURCES : AD Hérault, 59 W 31, Cour martiale 1944 ; 59 W 51, Cour de Justice. — Pierre Dumont, Jean Tavoillot, Capitaine Guizonnier, Nîmes, éditions Lacour, 2009. — Jacques-Augustin Bailly, La Libération confisquée, Albin Michel,1993. — Hélène Chaubin, L’Hérault dans la guerre, 1939-1945, Paris, éd. De Borée, 2015.

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